Peur, colere et tristesse paraissent les principales emotions que ressentent des patients atteints de maladies chroniques. Catherine Aimelet-Perissol, psychotherapeute, explique pourquoi Il semble essentiel de ne point faire l’impasse sur l’experience sensorielle.
Quelles paraissent les premieres emotions que ressentent habituellement des patients ?
Notre premiere intention reste generalement la peur, laquelle pourra entrainer le deni, l’evitement. Puis vient ensuite un sentiment de colere, pleinement logique, sachant que l’on ne peut nullement fuir face a la maladie. Cette colere se manifeste soit contre les medecins soit contre la maladie cette dernii?re aussi. Enfin, quand les patients se rendent compte que malgre la lutte, la maladie reste i chaque fois la, il n’y a plus d’autres parti pris que de se soumettre. Ce qui ne signifie en rien une acceptation. Vient aussi une phase de tristesse, qui va de pair avec un certain fatalisme.
Dans Divers cas, on va pouvoir avoir le sentiment que l’individu se laisse aller et ne combat plus. Notre patient a alors une impression d’abattement ainsi que desespoir. Cela a le sentiment d’etre seul face a sa propre maladie. L’idee que « c’est tel ca, on n’y peut pas grand chose » pourra generer un etat depressif.
Dans la livre intitule « Emotions : quand c’est plus tri?s que moi » (editions Leduc), vous expliquez qu’il est important de laisser d’une place a cette reactivite emotionnelle. Pourquoi ?
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Indeniablement, c’est fondamental. Cette reactivite n’a pas a etre jugee, car dans cette charge emotionnelle, il va falloir lire un elan a vivre. L’angoisse temoigne d’un desir d’echapper a J’ai maladie. L’emotion reste fondee via nos comportements biologiques et comporte, en cela, une dimension archaique, fondee dans une part du cerveau nomme reptilien. A mon sens, c’est reellement deculpabilisant d’etre conscient que c’est quelque chose de fort organique. Il faudra donc ecouter cette part biologique si naturelle de nos emotions et les prendre en consideration.
On evoque souvent que quand on cherche a combattre la maladie, on a plus de chances d’en venir a bout. Est-ce grand ?
Il convient en fonction de moi resister a la tentation de voir le quotidien comme un duel. Evidemment, il convient tenter de trouver en soi l’integralite des ressources pour lutter, mais Cela reste normal qu’il y ait une peur d’echouer.
Combattre la maladie ne devra en pas de cas se traduire par se combattre soi et donc s’en vouloir d’eprouver des emotions.
Pour tenter de vaincre la maladie, recommandez-vous d’avoir recours a la pensee que l’on qualifie de « positive » ?
Le patient, au-dela de subir, va tenter de faire face en mobilisant des gestes et des pensees.
Notre psychologie positive a le merite de nous inviter a formuler nos choses en se placant du cote de la life plutot que d’une mort. Mais si elle a des avantages, elle a aussi des limites, au sens ou elle nous pousse par forcement plus de performance. Ainsi, une diminution en vitalite est vecue comme votre probleme.
Cette categorie d’approche risque ainsi d’etouffer nos emotions. J’imagine notamment a une femme qui etait malade et ne supportait aucune le reconnaitre, si bien qu’elle passait des heures a penser que tout allait beaucoup. Elle occultait ainsi sa tristesse, sa peur et sa colere, en faisant croire a toutes les autres et a elle meme des propos qui ne correspondaient gui?re a ce qu’elle vivait. Autrement devoile, la psychologie positive est benefique si elle nous aide a accepter la realite. Pas si elle nous conduit a la maquiller.
Comment faire, precisement, Afin de eviter de basculer de l’acceptation aupres du travestissement ?
Je vous repondrais en vous racontant a nouveau une histoire, celle d’un homme atteint d’une sclerose en plaques. Lors d’un stage, avec d’autres participants, nous avions fera toute une collection d’exercices. Notre premier jour, il avait manifestement du mal a ne point tomber, mais tentait de dissimuler ses difficultes. A la fin du stage, Il semble venu avec une canne. C’etait un moment merveilleux puisqu’il avait fera 1 gui?re pour accepter sa fragilite. Cela est parvenu a bouger d’un mecanisme de defense Afin de s’interroger sur ce qu’il pouvait faire de sa vie ainsi que sa maladie. Cela avait arrete de se mentir et de rejeter J’ai realite.
Quel regard portez-vous sur la relation medecin / patient ?
Michael Balint, votre psychiatre anglais des annees 50, avait developpe des groupes de soignants qui reflechissaient a la relation medecins / malades. Ce type d’approche devrait etre impose a toutes les soignants.
Il va i?tre essentiel que les experts de sante, mais aussi tout le monde, comprennent que l’emotion ne doit pas etre vecue comme un probleme, mais tel une ressource. Mais aussi qu’ils realisent que la dignite du patient devra etre prise en consideration a sa juste valeur.
Laissez moi vous raconter une autre anecdote. J’ai accompagne via le passe, au niveau therapeutique, un petit homme atteint du sida. Il traversait une phase Complique jusqu’a ce qu’il realise qu’il devait se positionner dans une relation d’homme a homme avec le medecin. Ca lui est permis de ne plus etre dans un mecanisme de soumission. Il a reussi a trouver les mots qui lui permettaient de se sentir digne et vivant, car de toute evidence, le patient aspire a etre plus que une maladie.