Rencontre entre ce psychopedagogue et des ados confrontes aux « fracas » d’une separation et des parents.
. Cote ado
Anne, 17 ans : « il prenait la tete »« Mon premier chagrin d’amour, je l’ai connu par 14 ans, avec 1 garcon d’un an de plus que moi. Il m’a vite retourne la tete avec une jalousie. Il reprochait d’observer mes copines. Il est exclusif. J’ai tenu tronche. Il m’a quittee. C’etait dur. Je croyais au dialogue. En parler au milieu des copines, c’est bien. Elles ne sont nullement dans les memes histoires, mais quand meme, on se comprend. Ma mere m’a evoque : « Tu te doutais quand meme bien que tu n’allais jamais te marier avec ce garcon ! ». Je n’ai pas trouve ca drole. J’suis depuis neuf mois avec un autre garcon. Mais je pense qu’une relation stable en secondaire, c’est nullement le top. L’an futur, on va etre separes. »
> Reponse de Bruno Humbeeck : « Ne minimisons jamais le chagrin d’amour »
Etre parent d’adolescent, c’est souvent se mettre dans la peau de celui qui ne regroupe jamais. Notre tendance parentale a minimiser la souffrance de l’ado – « Une de perdue dix de retrouvee », « On n’est jamais serieux si l’on a 17 sept annees » – ou, au contraire, a le maximiser – « Ton chagrin me cause trop de peine », « Je ne supporte pas de te voir souffrir ainsi » – empeche effectivement souvent le parent de denicher le ton juste lorsqu’il s’agit Afin de lui d’effectuer face au chagrin d’amour de son enfant. Cette difficulte a concevoir la maniere dont l’adolescent vit sa rupture amoureuse est aggravee avec le fait que le parent ne partage generalement pas les memes histoires de reference que le enfant. Dans les faits, la metamorphose que le temps fera subir aux histoires d’amour a travers les generations ne permettra nullement a l’un de se mettre sans probli?me a l’espace de l’autre. Pour le parent et l’adolescent, les mondes vecus se constituent aussi comme des planetes differentes qui empechent de se saisir effectivement… quand bien meme l’on est tres lies affectivement. C’est Afin de ce qui qu’il est quelquefois plus efficace concernant le parent de manifester son soutien en montrant bien l’interet qu’il porte a l’etat emotionnel de le ado. Tout en acceptant de faire un pas de cote en laissant le jeune homme ou la jeune fille en difficulte affective se raconter a ses pairs ou, a defaut, a un professionnel du soutien psychosocial.
Celine, 16 ans : « J’me suis sentie moins que rien »« C’etait fort. C’est parti a l’universite. On se voyait nos week-ends. Mais je le sentais distant. Cela m’a quittee. J’me suis sentie moins que que dalle. Redevenir une gamine. Au moment oi? j’ai appris qu’il sortait avec une fille de secondaire, je n’ai plus rien compris. J’suis decue des garcons. Depuis, j’suis celibataire et je me sens bien. »
> Reponse de Bruno Humbeeck : « Le chagrin taraude l’estime sans dire »
« Se sentir moins que rien ». « Redevenir une gamine ». C’est i chaque fois une epreuve quand le chagrin vient tarauder l’estime que l’on se a Afin de empecher de grandir. Ne rien comprendre, ce n’est pourtant gui?re renoncer a savoir a se connaitre. Car c’est bien a cela que sert 1 chagrin d’amour chez un adolescent : savoir a savoir qui l’on reste face a la gageure d’aimer et d’etre aime quand bien ne depend nullement que sans dire. C’est la tout le travail qui attend Celine. Et pour ceci, il faudra bien qu’elle depasse l’idee que « l’ensemble des garcons seront comme cela » et qu’elle ose aimer a nouveau, plus forte de la connaissance qu’elle aura acquise d’elle-meme a travers l’epreuve d’la rupture. Ce n’est qu’a votre tarifs que le chagrin de Celine se metabolisera avec moyen en un delicieux souvenir qui lui permettra alors de surmonter sa desillusion en l’invitant a faire de l’amour une affaire qui vaut la peine d’etre vecue. Parce que « l’ensemble des garcons ne sont gui?re fondamentalement decevants » et surtout qu’elle coi»te, elle, certainement la peine d’etre aimee.
Hadrien, 17 annees : « Un chagrin Afin de ne rien faire a l’ecole »« On m’a devoile que je profitais de la situation pour ne rien Realiser a l’ecole. Franchement, j’aurais aime avoir un peu de comprehension. J’ai l’impression que je me suis gueri tout seul. Melanie est part avec votre copain. Je me suis achete la musique, la lecture. Mais la, je sens que j’ai perdu mon naturel et que j’ai des difficultes a faire confiance. Dans le cas, j’en connais qui enchainent les potes, mais franchement j’ai pas besoin. »
Reponse de Bruno Humbeeck : « Entendre l’etat emotionnel »
Ne pas etre ecoute, c’est une chose. Ne pas etre entendu en sera alors une autre. Dans le premier cas, c’est la narration de soi qui ne peut nullement se constituer aupres d’une autre personne. Dans le second, c’est pire i nouveau, c’est l’etat emotionnel qui ne trouve gui?re a s’exprimer aupres de ceux qui devraient bien s’y interesser, au maximum, le contenir. Voila pourquoi la rupture et le desespoir qu’elle a suscite chez Hadrien aurait pu, sans la musique et Notre lecture, se muer en desesperance. Voila comment, aussi, on voit laisse plus que des plumes : legerement de son naturel et beaucoup de sa confiance. Voila pourquoi, surtout, il n’a sans doute pu compter que dans le temps pour l’aider a se reconstruire et lui rendre, au-dela de l’epreuve subie, l’envie d’aimer a nouveau. Et ce qui, non nullement a travers des potes qui s’enchaineraient, mais a travers une histoire qu’il partagerait avec une fille qui, a ses yeux, en vaudrait la peine.